Sphérocytose héréditaire

Sphérocytose héréditaire (maladie de Minkowski-Chauffard)

Les globules rouges ont pour mission d’apporter l’oxygène à toutes les cellules du corps. Ils doivent donc parcourir de longues distances tout au long de leur vie, et se rendre dans des organes nourris par de très petits vaisseaux. Or les globules rouges ont une taille d’environ 7 microns. Pour se rendre dans certains organes, ils doivent se faufiler dans des vaisseaux dont le diamètre n’est pas plus grand que 3 microns. Ca ne leur est possible que parce qu’ils ont une extraordinaire plasticité, grâce à une paroi (on dit une membrane) extrêmement déformable.

Il existe plusieurs maladies dues à un défaut de déformabilité de la membrane du globule rouge, la plus fréquente étant la sphérocytose héréditaire, appelée autrefois maladie de Minkowski-Chauffard.

Elle est d’origine génétique, le plus souvent transmise par le père ou la mère. Souvent, le mode d’expression de la maladie n’est pas le même entre les générations : il n’est pas rare qu’on découvre qu’un parent est porteur d’une sphérocytose héréditaire à l’occasion d’un bilan sanguin demandé parce qu’un enfant est malade, alors que ce parent n’a jamais ressenti aucun symptôme. Plus rarement, une personne est la première de sa famille à présenter la mutation, qu’il risque ensuite de transmettre à ses enfants.

Il existe de nombreuses protéines dans la membrane du globule rouge et, donc, différentes mutations peuvent être responsables de sphérocytose héréditaire. De ce fait, l’expression de la maladie est très variable. Le point commun est le risque de destruction exagérée des globules rouges (on parle d’hémolyse). Quand les globules rouges sont détruits, on devient anémique, pâle et fatigué. La pâleur se reconnaît au mieux en regardant la paupière inférieure (qui n’est plus rose mais beige ou jaunâtre), la paume des mains et des pieds, qui deviennent blanches.

Les globules rouges détruits laissent échapper un pigment, la bilirubine, qui colore en jaune l’intérieur des yeux et les urines. Au plus fort de la destruction, les urines deviennent brunes (couleur coca-cola) ou même rouges. La constatation de ces signes impose d’aller en urgence à l’hôpital pour être transfusé.

Chez beaucoup de personnes, l’hémolyse est bien présente, mais ses effets sont compensés par le fait que la moelle se met à produire beaucoup de globules rouges neufs (on mesure la force de ce remplacement en chiffrant ces globules rouges nouvellement produits qui s’appellent les réticulocytes). Le nombre de globules rouges d’une personne atteinte de sphérocytose héréditaire est donc la résultat d’un équilibre entre les globules rouges détruits par l’hémolyse, et les réticulocytes produits par la moelle. C’est pour ça que des personnes ayant une sphérocytose héréditaire peuvent n’être diagnostiqués que tardivement, parce que chez eux l’hémolyse est parfaitement compensée par la production de réticulocytes. On pourrait évoquer le diagnostic si on observait un chiffre augmenté de réticulocytes, mais cet examen n’est pas fait sur toutes les numérations formule sanguines.

Toutes les personnes atteintes de cette maladie doivent être traitées par de l’acide folique, car cette vitamine est nécessaire à la production des réticulocytes.

Les nouveau-nés peuvent présenter une forme assez sévère de la maladie. Ils ont une jaunisse (= un ictère) marqué à la naissance, une anémie qui peut nécessiter une transfusion. Ils restent parfois anémiques les premiers mois de vie parce que leur production de réticulocytes peut mettre plusieurs mois à être capables de compenser le  niveau de destruction. Certains bébés sont traités par éythropoiétine pour pouvoir fabriquer plus de réticulocytes. Plus tard, les enfants ont parfois besoin d’être transfusés quand ils ont de la fièvre, car la fièvre accentue la destruction des globules rouges.

Le taux d’hémoglobine peut aussi baisser lors d’une infection virale, surtout par le Parvovirus B19, qui diminue fortement la production des réticulocytes pendant une ou deux semaines. Une transfusion est souvent nécessaire.

Chez certaines personnes, la destruction des globules rouges est très importante. Ils peuvent avoir une anémie nette, et avoir besoin de transfusions répétées. On peut traiter ces personnes en leur enlevant la rate (on appelle cette opération une splénectomie), car la rate est l’organe du corps où la circulation est la plus compliquée. En outre, il est fréquent que la taille de la rate soit augmentée dans cette maladie, ce qui majore encore sa capacité de destruction. Enlever la rate ne supprime pas la sphérocytose mais limite beaucoup la destruction des globules rouges. Cette opération était presque toujours faite chez les personnes porteuses d’une sphérocytose héréditaire il y a quelques années. Elle est limitée aux personnes les plus anémiques aujourd’hui.

Enlever la rate expose à un risque d’infections bactériennes, car la rate intervient dans la lutte contre les infections. On précède donc la splénectomie par des vaccins très efficaces, et on doit prendre des antibiotiques tous les jours pendant quelques années après l’opération.

Enfin, comme dans toutes les anémies dues à une destruction exagérée des globules rouges, la bilirubine libérée au moment de cette destruction peut s’accumuler dans la vésicule biliaire et être responsable de la formation de calculs. Il faut opérer pour enlever ces calculs qui risquent sinon de créer des douleurs ou des infections.